LA PORNOGRAPHIE, UN FACTEUR DANGEREUX BANALISANT LA CULTURE DU VIOL

Publié le 26 novembre 2025 à 12:32

INTRODUCTION

     Le sexe est omniprésent. Drôle de manière de commencer un article professionnel, cependant, il faut avouer que notre positionnement n’est pas incorrect. Le sexe est omniprésent, indissociable de l’être humain. L’humain vit avec le sexe et le sexe donne la vie à l’humain. Toutefois, la dimension sensorielle a pris davantage de place que la dimension reproductrice première. Et des divisions s’observent dans ce vaste domaine sexuel : les pratiques, l’orientation sexuelle, les spécificités uniques au corps de chacun, le plaisir personnel, l’importance du sexe aux yeux d’un individu, mais également les notions de consentement et de représentations.

     Et dans la première notion, celle de consentement, on retrouve son vol : le viol. Le viol est défini par l'article 222-23 du Code pénal français comme « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ». Cependant, ce n’est pas la définition de Relentlessness. Selon nous, le viol correspond à tout acte de nature sexuelle, avec ou sans pénétration, qui n’est pas entièrement consenti. C’est-à-dire qu’à la différence du Code pénal, nous estimons que même une personne consentante lors d’un rapport sexuel ou d’un lien sexuel peut se faire violer au sein de cette même liaison sexuelle. De la même manière qu’une personne forcée à violer quelqu’un d’autre subit aussi un viol. De la même manière qu’une personne qui n’est pas en état de consentir librement ou de manière rationnelle subit aussi un viol. De la même manière que nous incluons la notion de respect qui va de pair avec le consentement. Nous élargissons la définition de consentement, qui est encore trop mal interprétée dans les sociétés. Le viol est bien plus présent que ce que l’on pense, la culture du viol en est une preuve. En effet, selon Noémie RENARD, dans son ouvrage En finir avec la culture du viol, cette dernière est un système social qui rend les violences sexuelles possibles, acceptables ou excusables, en les minimisant, en les normalisant et en dévalorisant la parole des victimes. Cette culture fonctionne à plusieurs niveaux : dans le langage (blagues, justifications), dans le droit (traitement judiciaire), dans les mentalités (ce qu’on considère comme “normal” ou tolérable) etc. Cette culture du viol est présente absolument partout, et est encrée dans le patriarcat.

     La deuxième notion que nous voulions aborder dans cette introduction est celle de représentations. Et dans ce mot, nous entendons « représentations du sexe ». La pornographie est son exemple parfait. Selon le dictionnaire Larousse, la pornographie correspond à la présence de détails obscènes dans certaines œuvres littéraires ou artistiques : publication, spectacle, photo, etc. CNRTL définit la pornographie comme étant la représentation (sous forme d'écrits, de dessins, de peintures, de photos, de spectacles, etc.) de choses obscènes, sans préoccupation artistique et avec l'intention délibérée de provoquer l'excitation sexuelle du public auquel elles sont destinées. Cependant, il est relevé que dans les dictionnaires datant des XIXème et XXème siècles, la pornographie était le traité, l’étude sur la prostitution. Et en effet, le mot pornographie vient du grec pornê (πόρνη), qui signifie prostituée. La pornographie est donc liée à la prostitution dès son étymologie et serait par conséquent une forme de prostitution virtuelle, distancielle et représentative au sens premier du terme.

     Pourquoi parlons-nous de viol, culture du viol, pornographie et prostitution ? Le seul lien évident est le sexe, non ? Non. La pornographie et la prostitution contribuent à la culture du viol, et celle-ci contribue elle-même à l’essor du viol. Tout est absolument et parfaitement corrélé. Cet article a pour but premier de traiter du lien entre pornographie et culture du viol. En quoi la pornographie est un facteur important et dangereux de la culture du viol ? Pourquoi peut-on affirmer que la pornographie est elle-même un viol ? En quoi la réalité de la sexualité peut-elle être altérée à cause de la pornographie ? Est-ce que la pornographie est toujours d’actualité ? Comment se protéger de la pornographie ? Cet article a été rédigé afin de répondre à vos questions et d’établir la vérité sur cette pratique néfaste.

 

HISTOIRE DE LA PORNOGRAPHIE

     Quand on parle de pornographie, on pense surtout aux sites pornographiques sur Internet ou aux films pornos du XXème siècle. Il est vrai que la pornographie a connu un véritable essor avec l’apparition des contenus audiovisuels, toutefois, elle existe depuis toujours, même si sa fonction n’était pas exactement celle que l’on dénonce aujourd’hui. Dès la Préhistoire, des premières représentations sexuelles telles que les Vénus paléolithiques apparaissent. Celles-ci mettent en scène des femmes nues et exagèrent leurs attributs féminins. Des représentations de scènes sexuelles et érotiques ont aussi été découvertes dans des grottes préhistoriques (grotte de Chauvet ou grotte de Lascaux par exemple). Durant l’Antiquité, des fresques, poteries et sculptures (Pompéi) ou les temples indiens de Khajuraho, nommés Kâma-Sûtra représentent des éléments sexuels et érotiques détaillés. D’ailleurs, la marque érotique « Kamasutra » s’inspire de ces temples et des livres anciens indiens relayant des textes sexuels et érotiques. Durant le Moyen-Âge, la circulation clandestine de dessins et de miniatures érotiques était très répandue, et durant la Renaissance cela s’est accentué avec la diffusion plus large de la pornographie via des gravures pornographiques (I Modi en Italie) dans les élites.

     Mais c’est à partir du XVIIIème siècle que l’on repère une véritable explosion de la pornographie écrite et illustrée avec le libertinage, représenté dans les écrits du Marquis de Sade. C’est la première forme de pornographie commerciale. Au XIXème siècle, la photographie a permis l’essor de photographies pornos, mais celles-ci étaient encore diffusées clandestinement. Au XXème siècle, on parle de porno de masse : les magazines et les films pornos apparaissent dans les années 1960-1970. Cette époque est même nommée « l’âge d’or de la pornographie ». Dès 1990, les VHS normalisent l’achat domestique de contenus pornographiques. Enfin, Internet a donné naissance à la forme de pornographie la plus répandue de nos jours : les sites pornos. Et c’est notamment cette forme de pornographie que nous allons traiter dans cet article. Les sites pornos comme « PornHub » ou « YouPorn », ont entraîné un accès instantané et gratuit à la pornographie, ce qui a drastiquement augmenté la consommation de contenus pornographiques au fil des années. Cela a également contribué à la favorisation de la culture du viol, ce qui est dramatique. Nous traiterons également des nouvelles plateformes indépendantes, telles que MYM ou OnlyFans.

 

LA REPRESENTATION DU « SEXE » DANS LES SITES PORNOS

     Les sites pornographiques mettent majoritairement en scène des vidéos de masturbation ou de rapports sexuels. Ces rapports sexuels sont présentés à deux ou plus (plan à trois, gang bang etc.). Dans les vidéos mettant en scène au moins un homme et une femme, nous pouvons dénoncer un certain rapport de domination, où le plaisir masculin est au centre de ces contenus. La douleur des femmes est sexualisée, les actes imposés ou brusques sont normalisés. Dans ces vidéos, on repère très régulièrement des femmes soumises, humiliées et même de l’inceste. Et en effet, un rapport du Haut Conseil à l’Egalité (HCE) explique que 90% des contenus pornos présentent des violences (physiques, verbales, sexuelles) envers les femmes. Richard POULIN dans Sexualisation précoce et pornographie, annonce que la pornographie « pornographise » la société et la culture, et tend à rajeunir ses représentations en « pédophilisant » les contenus pornos. Par ailleurs, la représentation même de la femme est idéalisée : souvent totalement épilée, gémissant à chaque mouvement, maquillée, courbes généreuses et ventre plat. On idéalise le corps de la femme et on renforce le sexisme lié autour de l’esthétique féminin et des attentes masculines envers le comportement de la femme. Ici, la femme est objectifiée, il s’agit davantage d’un rapport entre une personne et un objet plutôt que d’un échange, d’un partage. Le sexe oral (ou préliminaires en général) est d’ailleurs beaucoup plus centré sur le sexe de l’homme que celui de la femme, ce qui encore une fois, renforce le stéréotype qu’une femme doit « répondre aux désirs de l’homme ». Il y a donc dès les fondements de ces vidéos, une vision faussée de la sexualité, pouvant ainsi avoir des impacts quant à la sexualité réelle des consommateurs.rices de contenus pornographiques. La pornographie n’est d’ailleurs pas naturelle, il y a plein « d’effets spéciaux » et de trucages.

     La pornographie participe à la confusion sur le consentement. Selon Noémie RENARD, le porno fait disparaître les négociations de consentement, montre des femmes qui “aiment toujours ça”, même lorsqu’elles protestent, présente le “non” comme un élément du jeu ou comme de la mise en scène. Cela nourrit l’un des mécanismes centraux de la culture du viol : l’idée que “les femmes ne savent pas ce qu’elles veulent” ou que “un non n’est pas vraiment un non”. Le porno renforce une sexualité où les femmes doivent être disponibles, performantes, dociles, ce qui construit des attentes irréalistes, comme si elles étaient universellement désirées. Cela agit donc comme un répertoire culturel qui influence les comportements, surtout chez les jeunes exposés tôt. La société sexiste et le porno violent créent un environnement où les pratiques humiliantes ou non consensuelles semblent normales. Dire que le porno crée la culture du viol serait inexact, car malheureusement, cette culture du viol est déjà bien encrée par d’autres facteurs, toutefois, il est impossible de négliger la responsabilité de la pornographie dans la normalisation de la culture du viol, amplifiée donc, par ce phénomène.

     Et nous pouvons remarquer assez facilement l’encrage de la culture du viol au sein des sites pornos. A commencer par les titres. Afin de mener notre enquête et d’apporter des preuves concrètes, nous avons dû nous rendre sur un site pornographique encore facile d’accès, que nous ne nommerons pas afin de ne pas vous inciter à vous y rendre. Nous n’avons même pas eu besoin de chercher que toutes les informations problématiques étaient déjà sous nos yeux : les premiers titres eux-mêmes explicitent la culture du viol, l’inceste et la pédophilie. Voici quelques titres :
«  Elle se met à quatre pattes pour éviter d’être licenciée », « Kira empêche le directeur du lycée d’expulser son fils », « Jeune fille fait l’expérience de sexe brutal avec un homme plus âgé », « Un faux psychologue baise une lycéenne », « MILF aux gros seins avale tout le sperme de son fils », « J’ai été utilisée comme objet sexuel par mes cousins et j’ai aimé ça », « Une employée soumise baise son patron dans le cul pour l’apprivoiser », « Jeune pute se laisse sodomiser par son père », ou encore « Femme est forcée d’avoir des relations sexuelles devant son mari à mains liées ». Votre choc est certainement présent, tout comme le nôtre. Les personnes souhaitant visionner de la pornographie cliquent sur ces vidéos afin d’observer du contenu à caractère sexuel mais sans forcément se rendre compte de l’impact direct ou indirect de ces titres « anodins ». Dans ce même site, les catégories les plus recherchées sont « soumise », « brutal », « salope française », « BDSM » et « poupée sexuelle ». Tout cela est publié de manière légale et sans contrôle. La sexualisation de la femme est aussi présente au sein de la communauté féminine elle-même car selon le thérapeute Mark REID, les femmes consommatrices recherchent majoritairement la catégorie « Lesbian », même si elles sont hétérosexuelles. On a encore plus d’attentes et on normalise ce qui se passe, ce qui accentue les fantasmes masculins et la culture du viol. N’oublions pas que ces vidéos sont diffusées sur Internet, elles ne partiront jamais. Et leurs titres, aussi scandaleux soient-ils, perdureront et inspireront d’autres titres. A partir de là, la culture du viol est déjà banalisée voire acceptée.

     C’est ce qu’affirme Andrea DWORKIN, dans son ouvrage Pornographie : les hommes s’approprient les femmes, en explicitant l’idée que l’industrie pornographique forme une structure de domination visant à déshumaniser les femmes, les violenter et à normaliser l’agression, le pouvoir et l’humiliation des femmes. Catharine A. MACKINNON, dans son livre Only Words, va plus loin en annonçant que la loi américaine protège la pornographie au nom de la liberté d’expression, alors qu’elle peut être un discours d’inégalité. Les mots posés sur ces titres ne sont pas de simples mots, mais des actes. Si la loi, qu’elle soit américaine, française ou autre, tolère ces titres, ne les contrôle pas et ne les censure pas, cela normalise le comportement violent et parfois incestueux retrouvé dans les vidéos. On assimilera titre et vidéo en jugeant possible et normal de « baiser une lycéenne », d’être « forcée d’avoir des relations sexuelles » ou de se « laisser sodomiser par son père ». Car en effet, la sexualisation de la femme, la représentation de brutalité et de situations d’incestes vont exposer les consommateurs.rices à une ignorance du consentement, une banalisation de la culture du viol, à une romantisation de la pédophilie et des fantasmes autour de l’inceste et du corps enfant sexualisé. Catharine exige que la pornographie soit comprise comme étant de la discrimination, et pas simplement comme un « discours offensant ». Gail DINES appuie cette idée dans Pornland : comment le porno a envahi nos vies. Sociologue féministe, elle décrit comment la pornographie moderne est plus dure, violente, sexiste et raciste que les formes plus anciennes. Elle affirme que la pornographie est devenue partie intégrante de la culture pop : les influences pornographiques se retrouvent dans la musique, la publicité, la mode, et cela impacte profondément la façon dont on perçoit la sexualité. Pour DINES, le porno n’est pas juste un “divertissement”, mais un problème de santé publique : il désensibilise, limite la liberté sexuelle réelle (pas seulement l’imaginaire), et impose des normes très homogènes et oppressives.

 

LA PORNOGRAPHIE EST UNE ADDICTION

     La cyberdépendance a été officiellement reconnue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2018. Cette cyberdépendance reconnaît 5 addictions : les réseaux sociaux, les jeux vidéo, les jeux d’argent, la recherche d’information et le porno. Dès lors, avant même d’analyser l’impact du porno sur les personnes consommatrices, on reconnaît déjà que c’est une addiction. Selon Ameli, une addiction est une dépendance à une substance ou à une activité, avec des conséquences néfastes sur la santé de la personne affectée. Et il est évident que beaucoup de personnes sont dépendantes à la pornographie et que cette dernière a un réel impact néfaste sur elles. En outre, selon Wifitalents, environ 70 % des hommes et 30 % des femmes déclarent regarder du porno chaque semaine. Dans un sondage Ifop pour LELO (2023-2024), 32 % des personnes interrogées déclarent que, lorsqu’elles se masturbent, elles utilisent des images et vidéos pornographiques. Cela signifie que la pornographie a un but d’excitation sexuelle et de plaisir personnel et qu’une grande partie de la population parvient à être sexuellement stimulée par des contenus intégrant la culture du viol, et donc par des contenus mettant en scène explicitement des viols. Autrement dit, le viol a tellement été banalisé que celui-ci excite les individus.

     Les addictions sont très dangereuses car elles provoquent un isolement social et changent drastiquement notre comportement. Et le dernier point cité est extrêmement repéré chez les personnes consommant du porno. D’après le rapport HCE 2024, chez les hommes de 25-34 ans, 64 % déclarent que la pornographie leur donne « envie de reproduire les gestes sexuels » vus à l’écran, ou qu’il ne faut pas diaboliser le porno. Parmi les hommes 25-34 ans, seulement la moitié perçoit un problème dans l’image des femmes véhiculée par le porno. De plus, 45 % des hommes qui ont vu leur premier film pornographique avant 11 ans disent qu’ils ont eu une « relation sexuelle » dans laquelle ils n’ont pas vérifié que leur partenaire était consentant.e. Parmi ceux qui ont consommé du porno entre 11 et 14 ans, 28 % disent avoir déjà fait une pratique sexuelle sans vérifier le consentement de leur partenaire. Toujours dans cette tranche d’âge, 39 % déclarent avoir été dans une relation où leur partenaire s’est laissé.e faire, mais ne le souhaitait pas vraiment. On peut donc émettre une corrélation entre porno et âge : plus on regarde du porno jeune, plus on a de chances de normaliser des comportements abusifs, de les appliquer dans sa vie sexuelle, de méconnaître ou d’ignorer la notion de consentement et donc d’alimenter la culture du viol voire de violer.

     Dans cette même perspective, nous observons que les jeunes regardent de plus en plus de porno, car ils ont évolué avec l’essor de la pornographie moderne, vue comme plus normale que les anciennes générations. Le problème est que le porno est souvent la première forme de sexualité qu’ils rencontrent, ce qui a un impact d’inculcation des « valeurs » pornographiques. Selon une enquête d’IFOP, la moitié des 15–17 ans ont déjà consulté des sites pornographiques. La pornographie peut épuiser ou transformer la capacité de désirer chez les jeunes, car elle propose un imaginaire sexuel. Thérèse HARGOT, thérapeute et sexologue, insiste sur le fait que quand des mineurs tombent sur des images pornographiques, on leur impose une « expérience sexuelle » sans qu’ils aient la capacité de choisir pleinement. Dans le rapport du HCE, il est écrit que la pornographie influence la perception du corps : des jeunes (18-34 ans) disent transformer leur corps pour se conformer aux images très normées véhiculées par le porno. D’ailleurs, selon une enquête IFOP / 01net, 2023, 30 % des consommateurs disent avoir été complexés par la taille de leur pénis à la suite de consommation de vidéos pornographiques. Louise PERRY, dans son ouvrage The Case Against the Sexual Revolution, critique l’idée que la « libération sexuelle » (depuis les années 1960) serait forcément positive. Elle affirme que la pornographie contemporaine masque des torts et que le consentement, tel qu’on l’enseigne, peut dissimuler des violences quand les inégalités de pouvoir persistent. Elle aborde aussi comment certains usages du porno peuvent être liés à des dysfonctionnements. Elle évoque une possible corrélation entre consommation de porno et dysfonction érectile chez certains hommes. Maria HERNANDEZ-MORA DEL CASTILLO démontre l’impact psychosexuel et identitaire de la pornographie chez les mineurs. La pornification de la culture (l’omniprésence des codes pornographiques dans la culture) joue un rôle important dans l’hypersexualisation des jeunes. Cela influence les perceptions, croyances et attitudes des ados : la pornographie est un « modèle des conduites sexuelles » et va au-delà du simple sexe en influençant aussi les manières de se comporter socialement selon le genre. De plus, elle lie cette pornification à une augmentation des violences sexuelles entre jeunes. Un usage trop fréquent de la pornographie peut même entraîner une violence interne. Les consommateurs.rices de porno peuvent s’en servir comme régulation émotionnelle, s’y attacher mais également provoquer un conflit moral, où l’individu sait que la pornographique est problématique mais ne s’en détache pas et continue à regarder ces contenus. C’est d’ailleurs l’un des aspects les plus retrouvés au sein des addictions : la personne a conscience de ses effets néfastes mais n’arrête pas pour autant.

 

LES NOUVELLES FORMES DE PORNOGRAPHIE

     Les sites pornos sont faciles d’accès. Il suffit de cliquer sur « J’affirme avoir plus de 18 ans » pour pouvoir entrer dans les sites, sans avoir à le prouver. Par conséquent, avoir accès à Internet est la seule condition pour pouvoir accéder à la pornographie moderne. Mais, depuis le 26 février 2025, un arrêté français impose un contrôle d’âge pour les sites pornographiques, notamment pour vérifier que les visiteurs ont bien plus de 18 ans. Selon le gouvernement, ministère délégué au numérique, et les données de l’ARCOM, plus de 2 millions de mineurs visitent chaque mois des sites pornographiques. Le groupe AYLO, propriétaire de Pornhub, YouPorn et RedTube, a décidé de bloquer l’accès à ses sites depuis la France à partir du 4 juin 2025, dénonçant l’obligation de vérification d’âge comme une « atteinte à la vie privée ». Dans sa page d’accueil, le site affiche un message politique « La liberté n’a pas de bouton off » pour expliquer sa décision. Quelques semaines plus tard, un tribunal administratif a suspendu l’arrêté : Pornhub, YouPorn et RedTube sont redevenus accessibles en France. Mais le Conseil d’État a finalement rétabli l’obligation de vérification d’âge le 15 juillet 2025. Depuis cette date, Pornhub est de nouveau inaccessible en France. Leur décision de se retirer par l’excuse de la liberté est extrêmement grave : cela montre que Pornhub et son groupe ne prennent pas au sérieux l’impact de leur réseau problématique.  Toutefois, étant donné que cette résolution est appliquée uniquement en France, il est très facile de contourner ces lois et d’accéder aux sites, avec l’usage de Nord VPN par exemple. Et même si l’ARCOM envisage des sanctions contre les VPN, David Cohen, psychiatre, affirme que l’interdiction stricte de la pornographie est irréaliste.

     Pour preuve, l’arrivée de nouvelles plateformes indépendantes comme MYM ou OnlyFans renforce la facilité d’accès aux contenus pornographiques. Ces plateformes ont été créées durant la dernière décennie, dans un but sexuellement explicite. Et au cours de ces dernières années, la popularité de ces plateformes a explosé. Selon Statista, en février 2025, il y avait 179 522 nouvelles demandes de comptes « créateurs » sur OnlyFans. Le site ElectroIQ indique qu’il y a plus de 300 millions d’utilisateurs inscrits sur OnlyFans et que près de 60 % des utilisateurs/consommateurs seraient des hommes. Mais, selon SimpleBeen, environ 84 % des créateurs OnlyFans sont des femmes. Selon Fenix International, la société qui opère Onlyfans, OnlyFans a généré environ 6,6 milliards de dollars de dépenses des fans en 2023. Une étude académique « Nudes ? Shouldn’t I charge for these ? » montre que parmi les créateurs nouveaux sur OnlyFans qui ne faisaient pas de travail du sexe avant, les motivations suivantes ressortent le plus : autonomie, design de la plateforme (gestion des limites), et l’impact de la pandémie du COVID-19. D’après la page officielle de MYM Power to Creators, 220 000 créateurs sont certifiés sur la plateforme pour un peu plus de 19 millions d’utilisateurs sur MYM. Il y a 4 millions de sessions par semaine sur la plateforme et 7 millions de contenus partagés en 2024. Les abonnements varient de 4,99 € à 99,99 €. En 2023, MYM indique un revenu de 95 millions d’euros, avec 69 millions reversés aux créateurs. La promotion de ces nouvelles plateformes est dangereuse pour la culture du viol : les jeunes femmes croient que c’est plus simple pour elles d’obtenir de l’argent, elles pensent agir en étant libres de leur corps puis elles finissent confrontées à des personnes problématiques et qui alimentent la culture du viol, elles sont stigmatisées et parfois peuvent se retrouver dans des réseaux de proxénètes. De plus, la visibilité de comptes OnlyFans sur les réseaux sociaux grandit, et ce, de manière simple, ce qui accentue l’exposition à la sexualité et à une vision faussée du sexe pour les plus jeunes, car rappelons-le, les réseaux sociaux tels qu’Instagram sont accessibles dès 13 ans, règle facilement contournable pour les moins de 13 ans. Cela accentue la culture du viol et banalise la prostitution virtuelle, ainsi que la pornographie. Ariel LEVY, dans Female Chauvinist Pigs : Women and the Rise of Raunch Culture, critique ce qu’elle appelle la « raunch culture » : c’est-à-dire une sexualité très sexualisée et fortement inspirée du porno où les femmes sont encouragées à s’objectifier elles-mêmes ou les unes les autres. Elle montre que cette culture hypersexualisée n’est pas seulement le fruit d’une libération féminine : elle peut renforcer des stéréotypes sexistes et servir les fantasmes masculins, plutôt que l’autonomie des femmes.

     C’est pourquoi Relentlessness affirme fièrement son opposition complète à toutes les formes de pornographie, demande le bannissement des plateformes en ligne et des sites pornographiques, appelle à une condamnation judiciaire et pénale des sites pornographiques et exige une éducation sexuelle davantage présente et encrée dans la société, et ce, dès le plus jeune âge.

C.W

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